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Errances,,,

« Je suis de nouveau en errance » me confie une amie très chère. Elle a effectué plusieurs aller et retour de confessions chrétiennes en judaïsme pour se fixer finalement dans notre communauté protestante libérale. Et voici que, de nouveau, elle ressent un malaise spirituel, existentiel, dans notre famille. D'aucuns qualifieraient ses errances successives d'instabilité, et certains l'ont fait. Pour ma part je mets cette insatisfaction récurrente sur le compte d'une soif d'absolu, d'une recherche d'idéal, inaccessible ici-bas, et qui ne peut se contenter de réponses, spirituelles certes, mais toujours marquées du sceau de notre imperfection humaine congénitale.

Moi-même je me considère toujours en mouvement, humainement et spirituellement. Ce mouvement n'est pas une errance mais une marche. Quelle est la différence ? Quand on marche, on lève un pied pour le poser plus loin en s'appuyant sur l'autre pied, fermement ancré sur le sol, et pas à pas on va de l'avant, enrichi des acquis du passé. La marche n'est pas nécessairement une ligne droite et l'on peut bifurquer en route. J'ai moi-même connu plusieurs changements d'aiguillage au cours de mon existence. L'errance est plus aléatoire. On va de part et d'autre et il peut arriver que l'on revienne en arrière, que l'on se demande si l'on avait eu raison de changer d'ancrage. On cherche sa voie mais un peu à tâtons. Est-ce à dire, comme certains le pensent, que l'errance spirituelle est une forme d'inconséquence ?

Ce peut être cela en effet, tout dépend des raisons de cette errance. En l'occurrence, s'agissant de mon amie, il me semble qu'il ne s'agisse pas d'une incapacité de se décider pour telle ou telle appartenance religieuse ou spirituelle et de s'y engager, mais bien plutôt d'une insatisfaction profonde consécutive à une soif d'absolu et à une impossibilité d'étancher cette soif après avoir entrevu et expérimenté le bonheur d'avoir enfin trouvé la voie qui semblait lui convenir. Le problème est que, la nature humaine étant ce qu'elle est, elle risque de ne jamais pouvoir se satisfaire d'une quelconque forme de spiritualité et de communauté qui lui convienne parfaitement. Son errance pourrait se prolonger jusqu'à la fin de ses jours. Le risque est de se retrouver seule, coupée de toute communauté de vie. Aussi, elle devra apprendre à vivre avec en tirant le meilleur parti possible de ce sur quoi elle pourra s'appuyer, sans renoncer pour autant à sa quête d'absolu.

Cela illustre la parole d'Augustin d'Hippone qui me parle beaucoup et qui explique bien cette marche parfois erratique : « Fecisti nos ad te Domine et inquietum est cor nostrum donec requiescat in te. » « Tu nous as fait vers toi, Seigneur, et notre cœur est (profondément) insatisfait jusqu'à ce qu'il repose en toi. » En cela consiste, à mon avis, l'errance récurrente de mon amie. Elle peut lui être pénible et incomprise par son entourage, mais elle est infiniment respectable et révèle une grande richesse spirituelle.

 

 

 

 

 

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