Un éclairage biblique, l'expérience d'Isaac-
Julia Blum – Israël Institute of Biblical Studies – 27/07/18
Cette semaine, nous célébrons Tu Be’Av, la « Saint-Valentin » juive. Explorez l'une des plus belles histoires d'amour de la Bible, l'histoire d'Isaac et de Rebecca. Elle commence comme une histoire de foi et devient une histoire d'amour. Dans Genèse 24, Isaac… prit Rebecca et elle devint son épouse, et il l'aimait (ye’ehaveha יֶּאֱהָבֶ֑הָ). Mais cette mention de l'amour dans la Bible est différente de toutes les autres. Qu'est-ce qui rend cet amour si spécial ?
Un mari affectueux
Il est important de noter c'est la toute première fois que le sens romantique du verbe hébreu אהב (ahav) - « aimer » apparaît dans la Torah (et la deuxième fois en général). Abraham aimait Sarah, mais les Saintes Écritures utilisent un autre mot pour décrire leur relation. Les sentiments qu'Isaac éprouvait pour Rebecca étaient certainement très forts, car la Torah a choisi d'utiliser ce verbe.
Un fils bien-aimé
Il est encore plus remarquable de voir que c'est au chapitre 22 de la Genèse que nous trouvons cette racine pour la première fois, lorsque Dieu dit à Abraham : « Prends ton fils, ton unique, celui que tu aimes (אהבת - ahavta) ». Il est intéressant de voir que les deux fois où il est utilisé, le verbe « aimer » est associé à Isaac : au chapitre 22 de la Genèse, c'était « celui que tu aimes » et au chapitre 24, celui « qui aima ».
Découvrez le message profond
La vérité éternelle de l'éducation des enfants est révélée par cette racine hébraïque : nous devons aimer nos enfants, afin qu'ils soient pleins d'amour en grandissant. Mais je crois que le message est encore plus profond : Dieu veut que tous soient aimés pour qu'ils puissent aimer. L'hébreu révèle des significations subtiles de sens qui changent notre compréhension des écritures bibliques habituelles.
Mon commentaire personnel
Ce que je retiens de cet éclairage biblique c'est qu'il est nécessaire d'avoir fait, d'une manière ou d'une autre, l'expérience d'un amour authentique pour être en capacité de concevoir un Dieu Amour. Une foi reçue dans l'enfance et même intériorisée à l'adolescence peut être ébranlée par la suite et même disparaître si la personne n'a pas éprouvée très concrètement dans sa vie la chaleur et la sécurité d'un amour total, fidèle et indéfectible.
Je sais quelqu'un qui a connu la dure épreuve d'être abandonnée par sa mère à la naissance et confiée par son père à une parente dure et dénuée de tout sentiment affectueux. Ayant découvert la chaleur de Jésus dans les évangiles, elle a trouvé refuge dans la foi et la consécration à Dieu. Après une longue période de vie religieuse où elle s'est vue dénier toute autonomie de réflexion et de décisions, elle a rompu ce lien mortifère et repris sa liberté. Les aléas de la vie lui ont fait bientôt connaître l'éblouissement d'un amour partagé ; mais il n'a jamais pu vraiment s'accomplir, car c'était un amour interdit par l'Eglise. Privée d'amour filial, n'ayant pu connaître le bonheur d'un amour conjugal et la joie d'enfanter, cette personne a fini par prendre ses distances avec la foi qui cependant l'avait amenée autrefois à embrasser généreusement la vie religieuse. Il lui avait manqué l'expérience vécue d'un véritable amour humain, d'un amour authentique capable de faire passer l'autre avant soi.
Comment présenter Dieu comme un père très aimant à quelqu'un qui n'a jamais connu ses parents, ou, pire, qui a été rejeté par eux, et qui n'a pas connu la tendresse d'un papy ou d'une mamie dans son enfance ? Comment présenter un Dieu amoureux de l'humanité à quelqu'un qui n'a jamais éprouvé l'allégresse de se savoir l'unique dans le cœur de l'être aimé, et de faire l'expérience que, l'un comme l'autre, ils sont tout l'un pour l'autre ? L'expérience d'une amitié sincère ou une filiation de cœur peuvent-elles suppléer à ce manque d'amour vital et permettre de concevoir un Dieu d'Amour ? Peut-être, en tout cas je l'espère profondément car l'amour fait vivre.