Mardi 21 juillet 2020, 3 h.15, encore une de mes ''bienheureuses insomnies''. Je m'installe à mon clavier d'ordinateur pour un bon bout de temps... Ces jours-ci j'ai retrouvé au fond de ma serviette bleue, héritée de mon épouse et marquée du titre d'une revue pour catéchistes ''Points de Repères'', un bouquin intitulé ''Le Conseil Presbytéral''. Il m'avait été remis il y a plusieurs mois par le pasteur de la paroisse après qu'il m'ait proposé de participer au Conseil Presbytéral local qui doit être renouvelé en septembre prochain. A cette demande j'avais opposé mon âge, 84 ans, et la diminution d'énergie que cela entraîne. Il a balayé ces réserves - je ne me rappelle plus exactement en quels termes - et je lui ai fait confiance en donnant mon accord. J'ai reçu cette demande comme un appel, une vocation, dans la droite ligne de tous les appels intérieurs et subjectifs, ressentis ponctuellement tout au long de mon existence, et des appels objectifs, des vocations proprement dites, qui m'ont été adressés officiellement par des responsables de l'Eglise à laquelle j'adhérais. Tous ces appels, je les intériorisais comme des appels directs de Dieu.
Durant mes années de grand séminaire à Lille, avec quelques amis, nous avons été initiés à l'hébreu par l'abbé Vanderhaeghe, à partir du texte de Samuel chapitre 3, versets 1 à 10, « Samuel, Samuel ! - Parle Seigneur, ton serviteur écoute ! » J'avais déjà ressenti, l'année de mes 20 ans, l'appel intérieur à vouer ma vie à Dieu. La découverte de ce récit m'en fit comprendre toute la portée et toute la signification. Par la suite l'appel officiel de l'Eglise, par la voix de mon évêque, entérina cet appel ressenti subjectivement et lui apporta une confirmation extérieure. Depuis, chaque nouvel appel à remplir une tâche auprès de mes frères er sœurs, croyants ou non - je pense notamment à mon mandat au Conseil des Prud'hommes de Valenciennes de 1987 à 2002 - est vécu et intériorisé à la manière de l'appel du jeune Samuel.
Depuis, les appels se sont succédés. Nomination comme vicaire de paroisse à Loos-les-Lille, puis comme aumônier de JOC à Roubaix, avant de revenir à la vie laïque où d'autres appels furent ressentis ou me furent adressés dans le domaine professionnel et syndical, et dans la vie d'Eglise paroissiale et diocésaine... Puis ce fut mon passage au protestantisme six ans après le décès de mon épouse et de nouveaux appels m'ont été proposés. Ainsi, un an plus tard, la proposition de mon pasteur, faite en voiture en revenant d'une rencontre œcuménique à Lille : ''Ca te dirait de reprendre la prédication ?'' J'ai acquiescé sans hésiter, retrouvant ainsi, en octobre 2012, ce qui avait donné sens à ma vie de 1963 à 1972, un véritable appel d'Eglise au service de la parole et des paroissiens. Récemment, il y a quelques mois, il m'a aussi proposé de participer au Conseil Pastoral qui doit être renouvelé à la rentrée, appel tout à la fois personnel et collectif qui actualise ma disposition au service de Dieu et de mes frères et sœurs.
Mais j'en reviens à ce livre que Frédéric, notre pasteur, m'a remis avant la coupure du Covid19. Je l'ai reçu un peu machinalement, comme un guide pratique, une sorte de ''mode d'emploi'' et je l'ai oublié au fond de mon porte-document. Le redécouvrant en faisant du rangement, je l'ai ouvert en prévision de la prochaine assemblée générale des paroissiens où seront élus les nouveaux membres du Conseil. Au verso en lettres majuscules : ''Ce livre est un guide pratique pour aider à comprendre le sens d'une organisation originale qui est au cœur de l'Eglise Protestante Unie de France : le Conseil Presbytéral''. En dessous, en caractères minuscules : 'Etre conseiller presbytéral est un ministère passionnant que l'on vit avec d'autres et qui fait appel à notre inventivité, notre créativité, notre sens des responsabilité et notre désir d'être au service du Dieu de Jésus-Christ.''... Et je me suis mis à le lire consciencieusement en commençant par l'introduction...
Dès les premières pages s'est réveillé en moi la conscience, un peu ensommeillée depuis quelque temps, de l'appel permanent de Dieu à le chercher et à le rencontrer dans le quotidien de ma vie. Les deux premiers chapitres : 'Une Eglise de témoins'', ''Une histoire qui a de l'avenir'' et ''Etre Eglise dans un monde qui bouge'' de Laurent Schlumberger et de Jean-Claude Deroche, ont renouvelé mon sens de l'Eglise et de sa mission dans notre monde. Guide pratique, sans doute, et d'autres chapitres entreront dans le concret des activités, mais bien situé et ancré dans une vision théologique et spirituelle qui doit le préserver de toute utilisation de pure organisation qui pourrait rebuter certains et certaines d'entre nous réticents à l'idée de se noyer dans une gestion administrative de la paroisse.
Je vais désormais poursuivre ma lecture à la lumière de ces premiers chapitres qui en constitueront sans nul doute le fil rouge.
Dans notre vie de foi en Eglise, deux sortes d'appels se complètent et se nourrissent l'un l'autre. D'une part l'appel intérieur et donc subjectif, désir profond, fruit du travail de l'Esprit en nous, de vouloir consacrer à Dieu chaque instant de notre vie, notre cœur, notre intelligence et nos capacités. Et d'autre part sa matérialisation objective dans ce que je nomme la vocation proprement dite (vocare : appeler de vive voix), demande extérieure à nous-mêmes qui nous est faite de participer concrètement à un service ou une activité d'Eglise. Ces deux éléments vont de pair pour l'accomplissement de la vie en Eglise. Le désir intérieur ne se suffit pas à lui-même car nous vivons notre foi en communauté organisée, reliés les uns aux autres dans l'Eglise du Christ. Par ailleurs, la réponse à un appel d'un quelconque responsable d'Eglise sans ce souffle intérieur qui fait de nous des serviteurs, serait vide de sens et assurément stérile. Ce qui importe c'est donc de ne pas laisser s'éteindre en nous la flamme qui nous a fait répondre un jour OUI, à l'instar de Samuel, PARLE, SEIGNEUR, TON SERVITEUR ECOUTE !