Récemment le pape François, devant le retentissement et l'ampleur du scandale des prêtres pédophiles, a lancé un appel au peuple pour recevoir un soutien dans sa lutte contre ce fléau. Voici ce qu'une amie, ancienne responsable de l'association' 'Plein Jour'' qui regroupe des ''compagnes de prêtres'' (voir le site web), lui a répondu dans une lettre ouverte.
Monsieur le Pape François,
Vous avez adressé une lettre au Peuple de Dieu. Nous faisons partie de ce peuple : un petit groupe d’amis laïcs, croyants et incroyants. Lors de votre voyage en Pennsylvanie, la révélation brutale d’un désastre vous attendait. D’après un rapport d’enquête, la pédophilie y sévit dans six diocèses sur huit. Et cela dure depuis 70 ans avec 300 prêtres abuseurs sur un millier d’enfants. Ces chiffres vous font horreur. Puis, ce fut l’Irlande, le Chili, les Pays-Bas…et maintenant, l’Allemagne. Un vrai cauchemar !
Vous lancez un appel au Peuple de Dieu pour qu’il vous aide à combattre et éradiquer ce fléau. « L’ampleur et la gravité des faits exigent que nous réagissions de manière globale et communautaire. » Vous avez eu des paroles de compassion pour les victimes des prêtres abuseurs et pourtant, elles restent déçues. Quels dédommagements l’institution compte-t-elle leur donner ? Y aura-t-il des sanctions pour punir les criminels ? Qui détient l’autorité pour intervenir dans le Haut Clergé ? Vous comptez sur nous ? Mais de quels outils disposons-nous pour offrir une aide efficace ?
Il faut bien reconnaître que dans l’Institution Eglise, les laïcs n’ont pas souvent voix au chapitre. Et les femmes sont tenues pour quantité négligeable. Sans parler des clandestines dont la vie est un long tourment quand elles partagent la double vie du prêtre. C’est ce que vous appelez d’un mot savant : le cléricalisme. C’est grâce à lui que tous les postes à responsabilités sont attribués exclusivement à des prêtres ou à des gradés de la hiérarchie. Tous les pouvoirs sont concentrés dans les mêmes mains. C’est ainsi que s’est formée une caste à l’intérieur du christianisme. Une élite ? !
Mais le cléricalisme ne se nourrit-il pas des enseignements de l’Eglise elle-même, dans la théologie du sacerdoce ? Affirmer aux candidats à la prêtrise que l’ordination sacerdotale va modifier leur nature intrinsèque, cela les persuade de n’être pas comme les autres êtres humains. L’ordination imprimerait en eux un caractère sacré, éternel, qui les place au-dessus du peuple. Des demi-dieux en quelque sorte ! Une mentalité tout à fait à l’opposé de celle de Jésus. Les sacraliser les fait sortir de la vie réelle.
Un autre dossier est en attente depuis le XVIe siècle: celui du célibat ecclésiastique. Martin Luther l’avait présenté à la réforme, mais en vain. Dans l’Eglise primitive, tous les prêtres pouvaient se marier, même les évêques et les papes. Il y a eu bien des papes qui sont devenus papas ! Mais en 1139, le Concile de Latran imposa le célibat obligatoire. Cette interdiction faite aux prêtres d’aimer une femme s’oppose aux droits humains. Ne pas pouvoir vivre un amour inscrit depuis les origines au cœur de tout homme et de toute femme, engendre des souffrances et des dégâts considérables.
Cette discipline fut imposée par un Concile, un autre peut la supprimer. Nous demandons à la hiérarchie de l’Église de permettre à chaque être humain de choisir un style de vie selon sa conscience pour la réalisation de son être profond. Nous espérons très fort que vous aurez l’énergie d’opérer le changement qui s’impose.
Soyez assuré de notre profond respect.
Dominique Venturini, Ex-Présidente de l’Association PLEIN JOUR (http://plein-jour.eu) - 8, rue du serpolet - 84160 LOURMARIN (France)